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Vie des affaires

Société civile professionnelle

Retrait d'une SCP : vous pouvez demander la nullité d'une assemblée après avoir perdu la qualité d'associé

Si, en raison de son statut professionnel, un associé perd sa qualité d'associé dès son retrait de la société civile professionnelle, il reste néanmoins propriétaire de ses parts sociales jusqu'au remboursement intégral de celles-ci. De ce fait, il peut faire annuler une assemblée postérieure à son retrait en sa qualité de créancier de la société.

Le retrait d'un associé d'une société civile professionnelle de kinésithérapeutes

Un associé d'une société civile professionnelle (SCP) de kinésithérapeutes se retire de celle-ci. Conformément à l'article R. 4381-70 du code de la santé publique, l'article 20 des statuts de la société dispose que l'associé retrayant perd, à compter de sa cessation d'activité, les droits attachés à sa qualité d'associé, à l'exception toutefois des rémunérations afférentes aux apports en capital et de sa part éventuelle dans le capital et dans les réserves et les plus-values d'actif.

Pour mémoire, un associé d'une SCP peut se retirer de la société, soit qu'il cède ses parts sociales, soit que la société lui rembourse la valeur de ses parts (loi 66-879 du 29 novembre 1966, art. 18, al. 1er).

En principe, l'associé qui se retire d'une société civile ne perd sa qualité d'associé qu'après remboursement de la valeur de ses parts sociales (cass. com. 17 juin 2008, n° 06-15045). Toutefois, certains textes spéciaux prévoient la perte, pour le retrayant, de sa qualité d'associé dès son retrait ; tel est notamment le cas des SCP de masseurs-kinésithérapeutes.

L'associé retrayant reste propriétaire de ses parts sociales jusqu'à leur remboursement intégral

Après le retrait de l'associé, des assemblées - notamment celle arrêtant les comptes de la société - sont tenues. L'associé retrayant demandent leur annulation en justice. Il fait valoir, pour cela, que les délibérations adoptées lors des assemblées, notamment celles relatives à la validation des résultats de la société, ne tiennent pas compte de ses droits patrimoniaux tels qu'ils résultent des statuts.

Rappelons, à ce titre, que tout associé qui se retire d'une société a droit au remboursement de la valeur de ses droits sociaux (c. civ. art. 1869, al. 2). Tant que l'associé n'a pas obtenu le remboursement intégral de ses parts sociales, il en reste le propriétaire et conserve les droits patrimoniaux (par exemple, le droit aux bénéfices) rattachés à celles-ci (en ce sens : cass. civ., 1re ch., 16 avril 2015, n° 13-24931), compte tenu, le cas échéant, des aménagements statutaires.

La demande de l'associé est rejetée par les juges d'appel. Ceux-ci estiment qu'en application des statuts de la SCP, l'associé retrayant a perdu le droit de participer aux assemblées et, par conséquent, de demander leur annulation en justice.

L'annulation d'une assemblée en tant que créancier de la société

L'associé retrayant se pourvoit alors en cassation et obtient gain de cause.

Pour la Cour de cassation, tant que l'associé retrayant n'a pas obtenu le remboursement intégral de ses parts sociales, il conserve un intérêt à agir en annulation des assemblées générales, non pas en sa qualité d'associé [qu'il a perdue dès son retrait], mais en celle de propriétaire des parts sociales et de créancier de la société, ainsi que pour la sauvegarde des droits patrimoniaux qu'il a conservés.

La Cour de cassation précise que ces droits patrimoniaux tiennent aussi bien au capital apporté et à la valeur de ses parts qu'à la rémunération de son apport.

À noter. Cette solution n'est pas nouvelle. En effet, la Cour avait jugé à propos d'une SCP de notaires que l'associé retrayant pouvait, malgré la perte de sa qualité d'associé, demander en justice l'annulation d'une assemblée postérieure à son retrait ayant voté l'annulation de ses parts sociales et l'attribution, en contrepartie, d'une indemnité (cass. civ., 1re ch., 17 décembre 2009, n° 08-19895).

Pour aller plus loin :

« Professions libérales », RF 2020-5, § 4303

Cass. com. 7 juillet 2021, n° 19-20673